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3 COMMINGES LA LEGENDE DE SAINT GAUDENS
Certains
villages et villes ont une histoire qui se confond avec la légende et Saint-Gaudens
est de ceux-là.
Elle
remonte très loin dans le temps, au 5ème siècle après Jésus-Christ,
comme tant d’autres ! Edmond Plagnol de Pointis-Inard sait raconter les
histoires de saints et de martyrs qui ont donné leurs noms à des villes ou des
villages ou bien qui sont devenus les « patrons » de la paroisse.
Il
nous conte celle du berger qui s’appellait Gaudens et qui habitait avec sa mère
Quitterie sur les serres au-dessus du plateau où se dressera vers le 14ème
siècle la bastide qui gardera le nom de Saint-Gaudens.
Les
saints patrons de nos villages étaient et sont toujours les saints patrons des
églises : st Martin à Liéoux et
Bordes-de-Rivière ; la Nativité de la ste Vierge à Estancarbon et
Labarthe-Dinard ; st Ignace à St-Ignan et Carignan ; st Barthélemy à Landorthe
; st Bernard à Savarthès ; st Blaise à Saux-Pomarède ; st Roch à Lacan ; st
Jean-Baptiste à Lode ; st Marcel à Saint-Marcet et st Gaudens à Saint-Gaudens,
etc, etc.
Gaudens le jeune berger des serres.
« En
475, au 5ème siècle, les Wisigoths se sont emparés des provinces
gallo-romaines du grand sud-ouest de la France et ont fondé un royaume dont la
capitale est l’antique Tolosa. En cette année, le roi qui règne sur ce vaste
territoire qui s’étend des alentours de Toulouse jusqu’aux Pyrénées, se nomme
Evaric. Les Wisigoths sont chrétiens mais opposés à la grande Église catholique
bien implantée dans cette vaste province depuis les années 250 grâce à
l’évangélisation de saint Saturnin, évêque de Toulouse.
Ils
sont issus d’une hérésie qui a gagné la moitié du monde connu de l’époque,
l’arianisme. Les ariens croient en l’existence du Dieu de l’Ancien Testament
mais voient en Jésus un homme et non le fils de Dieu. Ils sont combattus par
l’Église catholique et donc, par l’évêque de Rome, successeur de saint Pierre.
Cette hérésie a été condamnée au Concile de Nicée en 325 mais elle perdurera
jusqu’à la conquête totale de la Gaule par Clovis. Les Wisigoths envahissent
alors l’Espagne et fondent un autre royaume.
Evaric,
en 475, veut imposer sa religion aux populations de son royaume et pour cela il
multiplie les arrestations et les exécutions. Il a décidé de tuer tous ceux qui
refusent d’abjurer la foi catholique. En cette année, il envoie un de ses
généraux, Malet, vers les serres (plateaux surélevés) du piémont pyrénéen. Sur
ces lieux battus par les vents, un village existe, il s’appelle le « Mas
Saint-Pierre » en l’honneur de l’église dite de St-Pierre bâtie par
l’évêque Saturnin ou Sernin, c’est selon, lorsqu’il était venu apporter la foi
chrétienne à des peuples païens.
Il
arrive avec ses soldats dans cette région où les villages sont petits et
dispersés. Non loin du Mas, il aperçoit un jeune berger d’environ 13 ans qui
garde ses moutons dans la lande. Il lui demande son nom et où il habite. Le
jeune garçon lui répond qu’il se prénomme Gaudens et qu’il habite avec sa mère
Quitterie sur la colline. Il n’a plus de père et ils vivent chichement. Le
général lui demande quelle est sa foi et Gaudens ne la cache pas, il croit en
Dieu et en son Eglise.
Malet
le fait arrêter par ses soldats et l’emmène pour l’interroger et le convaincre.
Il lui redemande : « Quelle est ta foi ? » et Gaudens répond
toujours qu’il croit en la vraie Eglise. Il refuse de renier son Dieu malgré
les promesses et les menaces. Un des lieutenants d’Evaric se dit : « Il
est entêté, je vais faire venir sa mère qui le raisonnera de peur de le perdre.
Elle le convaincra ». Il dit à Gaudens : « Va rejoindre ta mère et
revenez ensemble ici ». Gaudens savait quelles étaient les convictions de
sa mère et qu’elle lui conseillerait de ne pas céder aux pressions. Il part la
chercher et ils reviennent devant leurs persécuteurs à qui il répète qu’il est
prêt à perdre la vie plutôt que de renoncer à sa foi. Aussitôt, un soldat lui
tranche la tête avec son glaive. Quitterie voit mourir son fils unique, elle
éprouve une immense souffrance mais en même temps elle est fière de son
courage. Elle aussi refuse d’abjurer et elle est tuée à son tour le jour
même. »
C’est alors que la légende rejoint l’histoire.
« Gaudens
se relève et ramasse sa tête qu’il porte dans ses mains jusqu’à l’église de
St-Pierre. A un moment donné, il s’arrête sur le bord de la route et la pose
sur une pierre qui sera vénérée durant des siècles sous le nom de « martyr
de Saint-Gaudens ». Les ariens, devant ce miracle, prennent peur mais
décident de le rattraper, ils montent sur leurs chevaux et se lancent à sa
poursuite. Gaudens a eu le temps d’entrer dans l’église et de refermer la
grande porte. Ils ne purent y pénétrer et pourtant, ils essayèrent d’enfoncer
le portail en lançant les chevaux contre lui. On dit que les fers des animaux y
restèrent collés. Les soldats, épouvantés, s’en furent.
Les
habitants, frappés par le prodige, décidèrent de donner le nom de Saint-Gaudens
à leur village. Ce nom sera conservé lorsque la bastide s’élèvera sur le
plateau et autour du Mas St-Pierre. Une chapelle a été construite à l’endroit
même où l’enfant eut la tête coupée, au lieu dit « la Caoué » en haut
de la côte de Valentine. Une fontaine y coule, elle porte le nom de
« fontaine du bourreau » pour rappeler que le soldat qui décapita
Gaudens lava ses mains et son glaive dans son eau fraîche.
La
chapelle a été constamment rebâtie au même endroit pour conserver le
souvenir. »
Où
se trouve l’histoire et où se trouve la légende ? Le Moyen-Age vit les
chrétiens mourir pour leur foi par milliers, on dit qu’ils recherchaient le
martyre pour mériter le Ciel. Se faisant, ils nous ont légué de belles et
grandes leçons de courage et d’abnégation.
Clément
Belvis
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