Septembre – Octobre –Novembre 2002                                         Jacqueline Mansas

 

ARTICLES PARUS DANS LA SEMAINE DES PYRENNES

4. rue André Fourcade BP 536 – 65005 TARBES Cedex

Mel : semaine.pyrenees@wanadoo.fr

(Les titres ont été changés pour ce dossier sur l’affaire Marignac mais tous les articles ont été écrits par J. Mansas de la Gazette des Vallées)

 

Sommaire :

  1. Les salariés du Comminges rencontrent la nouvelle sous-préfète.

2.      Les fours de l’usine Péchiney Electro-Métallurgie (PEM) de Marignac sont toujours éteints malgré les promesses et les citoyens expriment leur incompréhension

  1. Maleine Clary de Marignac et Emile Montfort de Boutx, tous deux retraités et concernés profondément depuis le début par l’affaire, essaient d’exprimer ce que ressentent au fond d’eux-mêmes la plupart des habitants.

4.      La conclusion du rapport CIDECOS

5.      L’opinion des syndicats et du Collectif pour l’Emploi dans le Haut-Comminges

6.      Le rapport qui prouve que le site de Marignac est viable

 

 

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Les salariés du Comminges rencontrent la nouvelle sous-préfète.

 

Premier contact avec les revendications des salariés du Comminges pour la nouvelle Sous-Préfète, Nathalie Marthien, le mercredi 25 septembre 2002. Ce jour-là, à 17 heures 30, les représentants des salariés d’une dizaine d’entreprises tant publiques que privées se sont réunies pour accompagner la délégation CGT reçue par la Sous-Préfète (représentants CGT de ces entreprises) à la sous-préfecture. Nathalie Marthien a été à l’écoute des propositions qui lui ont été faites à savoir : la retraite pleine et entière à 37 et demi de versements, la retraite à 55 ans pour les femmes et les salariés effectuant des travaux pénibles et insalubres et pour les travailleurs postés        ayant effectués plus de 25 ans de poste.

La Sous-Préfète a écouté avec intérêt les problèmes qui lui ont été exposés à savoir également la régression du service public à cause des difficultés connues dans le secteur privé qui ne fait qu’accentuer la désertification du Comminges.

La délégation comprenait en particulier des salariés des groupes qui ont licencié durant 2001 et 2002 comme Rizla+, Rouleau-Guichard de Toulouse et de Péchiney Marignac, ainsi que d’autres florissantes comme Tembec (cellulose de Saint-Gaudens). Mais bien évidemment et dans d’autres domaines toutes les entreprises du Comminges étaient représentées ainsi que le service public ), ce qui donnait en tout une soixantaine de personnes. La délégation est entrée vers 18 heures et la discussion avec Nathalie Marthien a duré environ une heure. A 19 heures, les délégués syndicaux sont ressortis et ont fait un compte-rendu de l’entretien. A leur sens, cette première rencontre a été satisfaisante, la sous-préfète les a écoutés avec attention. Ils ont pu exposer les problèmes de la région et elle a parue très intéressée par leur analyse de la situation. Elle a affirmé sa volonté de recevoir tous les acteurs locaux afin de pouvoir bien étudier les dossiers et d’arriver à concrétiser les projets. Si des entreprises s’installent, il est évident qu’une partie des problèmes socio-économique du Comminges seront résolus.

Cette manifestation plutôt bon enfant avait été organisée pour marquer le coup face à la nouvelle sous-préfète. Son prédécesseur Lionel Lemoine avait participé activement la création du Pays de Comminges, du Comité de Bassin de l’Emploi et les dossiers de projets s’étaient rapidement empilé sur son bureau. Nathalie Marthien entend bien continuer dans la même voie. Dès son arrivée elle a reçu bon nombre de personnes, tant des élus que des chefs d’entreprises et sa volonté de bien faire est nette.

Pour les salariés, par contre, la vigilance s’impose, il n’est pas question de laisser passer quoi que ce soit quoiqu’ils se sont aperçus avec les deux affaires de Rizla+ à Mazères sur le Salat où tous les salariés ont été licenciés et la papeterie fermée définitivement, et de Péchiney Marignac où seulement une cinquantaine d’ouvriers ont été réembauchés pour une seule unité de production en fonderie. Cinquante autres sont toujours en « congé de reconversion ». La SODIE, société de reclassement a réussi à faire venir en Comminges deux entreprises qui ont créé seulement quelques emplois sur Saint-Gaudens.

Les salariés des entreprises tant publiques que privées sont toutefois inquiets pour leur avenir. Une reprise économique créatrice d’emplois serait la bienvenue dans la région et relancerait les services publics qui sont sur la sellette pour certains.

 

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Les salariés du Comminges devant la sous-préfecture de Saint-Gaudens pendant que la délégation rencontrait la sous-préfète.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Les fours de l’usine Péchiney Electro-Métallurgie (PEM) de Marignac sont toujours éteints malgré les promesses et les citoyens expriment leur incompréhension

 

Juillet 2002 sonnait le glas du site de fabrication de magnésium de Péchiney Electro Métallurgie de Marignac. Au mois d’août 2002, dans des conditions assez incompréhensibles et plutôt contestables aux dires de la majorité des salariés et de la population ; 31 plus 18 ouvriers ont été réembauchés. 50 sont inscrits à l’A.N.P.E sans grand espoir de retrouver du travail dans la région alors que pour la plupart, ils ont encore des enfants dans les écoles ou dans les universités et quelques crédits à rembourser comme la construction d’une maison par exemple, 100 ayant 53 ans et plus, sont dans la situation des pré-retraités et n’ont pas d’autre alternative que d’attendre la retraite. Ils ne chercheront même pas de travail puisqu’il n’y en a pas pour eux vu leur âge. Pour la grande majorité d’entre eux, ils sont entrés très jeunes à l’usine et ils ont les trimestres requis. Pour les autres, rien ne leur sera proposé.

Depuis janvier 2002, un collectif composé des syndicats de l’usine, de l’Union Locale CGT, du Comité d’Action, du Comité de Bassin de l’Emploi, du Parti Communiste et d’ATTAC, demande avec insistance la tenue d’une Table Ronde avec les pouvoirs publics, les élus et les acteurs locaux pour l’emploi dans le Comminges. Le Conseil Régional et le Conseil Général de la Haute-Garonne ont appuyé officiellement cette demande en formulant un vœu. A ce jour, rien n’a avancé, la situation est toujours au point mort.

Le 18 avril 2001, le PDG de la branche PEM de Péchiney, Jacques Gani annonçait la fermeture de l’unité de fabrication de magnésium pour juillet de la même année. Aussitôt, les salariés s’unirent autour de leurs syndicats pour essayer de faire arrêter le processus. Ils croyaient qu’ils y arriveraient parce qu’ils avaient foi en leur savoir-faire, en la qualité de leur travail et parce qu’à ce moment-là, ils étaient nombreux dans l’union et avaient derrière eux toute la population du Haut-Comminges.

En juin 2001, Péchiney, pour gagner du temps (face à la mobilisation ?) accepte de faire des essais sur le recyclage des déchets d’alliage et la récupération du magnésium en appliquant le procédé utilisé depuis des années et qui est unique au monde. En fin août, devant la réussite de ces essais, Péchiney les arrête et ne veut plus en entendre parler. Pourtant les résultats sont concluants, le cabinet d’expertise CIDECOS de Lyon qui a suivi ces opérations à la demande du Comité Central d’Entreprise de Péchiney Electrométallurgie, l’affirme haut et fort : le site de Marignac peut être reconverti.

Mais malgré toutes les actions menées, la direction, fait la sourde oreille préférant payer les salariés à ne rien faire (ce qui a laminé totalement leur moral) plutôt que de repartir sur de nouvelles bases dans un site, rappelons-le encore une fois, unique en Europe.

Pourtant en 2001, Le PDG de Pechiney déclarait dans la presse régionale qu’il n’avait pas du tout l’intention de fermer cette usine. Alors, pour quoi en faire se demandent les commingeois ?

Et en effet, sur ce point, il a tenu sa promesse, l’usine n’est pas fermée, théoriquement il ne devrait y avoir qu’une unité de fonderie mais de quoi ? personne ne sait rien à l’heure actuelle et aucun four n’a redémarré. Le moral de la majorité des ouvriers embauchés ou en congé de reconversion jusqu’au 31 mars 2003 est au plus bas.

En début octobre 2002 une réunion organisée par le Comité d’Etablissement a rassemblé une bonne soixantaine de salariés mais que pouvait-il en sortir à part de bien remarquer que la cohésion d’une certaine partie du personnel existe toujours et qu’il ne suffit que d’une étincelle pour que l’union se refasse autour d’un avenir commun.

Les habitants qui se sentent fortement concernés veulent s’exprimer, ce qui est normal dans le contexte actuel social et économique du Haut-Comminges alors qu’il est admis officiellement que l’on doit maintenir le tissu industriel dans ces vallées Haut-Garonnaises, que le tourisme et la culture sont secondaires et ne doivent arriver qu’en complément. Mais attirer des entreprises est une lourde charge car combien d’entre elles répondront à l’appel et combien de personnel embaucheront-elles chacune ? Remplacer les 250 emplois de Marignac plus les 85 de Mazères-sur-le Salat, soit au total 335 familles vivant du travail en usine, ne sera pas facile.

 

Maleine Clary de Marignac et Emile Montfort de Boutx, tous deux retraités et concernés profondément depuis le début par l’affaire, essaient d’exprimer ce que ressentent au fond d’eux-mêmes la plupart des habitants.

 

« La Semaine : Marignac peut vivre, il suffisait de reconvertir le site. Comment analysez-vous cette situation ?

Emile Montfort : Les salariés ont mené des essais de juin à août 2001 qui ont été validés par le cabinet d’expertise CIDECOS mandaté par le CCE, c’est-à-dire à la demande des ouvriers et de la direction de Péchiney qui a accepté. Elle les a arrêtés quand elle a vu qu’ils étaient concluants. Une question se pose toujours : pourquoi a t-elle donc accepté ?

Maleine Clary : il ressortait de ces essais que l’usine restait rentable. Ce qui était contraire aux intérêts du groupe Péchiney et aussi de ceux des actionnaires. Mais il aurait fallu que les ouvriers soient mieux informés sur le fonctionnement de l’entreprise.

E.M et M.C : il aurait été très important que les salariés participassent à la gestion de l’usine. Disons, plutôt, qu’il serait surtout très important qu’il auraient pu continuer à y participer car ils ne sont pas encore licenciés. Ce licenciement prendra effet en fin mars 2003 à savoir : 50 licenciements « secs » ce qui veut dire sans perspective de retrouver du travail dans l’immédiat et une centaine de 53 ans et plus qui ne seront jamais reclassés car destinés à la retraite.

 

La Semaine : Et si Péchiney avait accepté d’aller plus loin ?

E.M : avec les essais menés à leur terme, la production de magnésium recyclée pouvait laisser l’usine viable : elle serait devenue un pôle de recyclage européen. Pour les années à venir, échéance 2007-2010, 95 % des déchets automobiles par exemple devront être recyclés et l’Europe sera amenée à « construire » une usine de retraitement de tous les déchets industriels. Or cette usine existe déjà, il suffit de l’aménager avec très peu d’investissements d’où une économie considérable pour les contribuables européens. Le procédé qui était utilisé sur ce site pour fabriquer le magnésium peut être utilisé pour le recyclage des déchets. Il s’adapte totalement. Seule notre usine est à même de réaliser ce projet et elle seule.

M.C :En plus, les travailleurs de l’usine PEM Marignac sont les seuls en Europe à posséder le savoir-faire pour réaliser ce recyclage. Si ce site était mis en place, il ferait travailler 130 personnes immédiatement, chiffre qui augmenterait au fur et à mesure que la demande de magnésium pour l’industrie augmenterait.

 

La Semaine : que s’est-il passé à la suite du refus de Péchiney de continuer les essais ?

E.M : A partir de ces constatations, un Collectif s’est constitué pour demander la tenue d’une Table Rode avec tous les partenaires politiques et économiques afin de pérenniser ce projet. Les syndicats de Marignac, le Comité d’Action, l’Union Locale CGt, le PCF et Attac ainsi qu’une représentation des sous-traitants font partie de ce collectif.

M.C : il faut préciser que les salariés de ces entreprises sous-traitantes dépendent des activités de PEM et que l’on a demandé tout cela depuis le mois de janvier. Le Conseil Régional, le Conseil Général de la H ?G, le CBE se sont prononcés officiellement pour la tenue d’une Table Ronde mais on peut se demander pourquoi rien ne se met en place alors que le Comminges voit partir les plus importantes de ses industries.

 

La Semaine : Que peut-on faire aujourd’hui ?

M.C : La question serait plutôt : comment récupérer une situation comme celle de PEM-Marignac face aux actionnaires jamais rassasiés ? Ou quels vont être les lendemains d’une telle situation ?

S’agit-il de mettre les marchés financiers face à la détresse des salariés et de leurs familles sans un choix politique clair : fric ou individu ? Même si cette société était plus tournée vers les individus, cela n’empêcherait pas d’être suffisamment rationnel et rigoureux face aux problèmes de chacun.

Il est évident que dans une société toute tournée vers l’individu, ce qui serait juste et humain, on pourrait se demander comment repousser l’individualisme d’aujourd’hui dans cette société d’exploitation mondiale, avec tout ce qu’elle comporte de négatif. La situation actuelle que nous vivons avec cette « fermeture », réduit la population à un état de survie économique et sociale. »

 

La conclusion du rapport CIDECOS

 

L’expert de CIDECOS avait présenté aux ouvriers, au Comité d’Action, aux élus, son dossier très important le 4 septembre 2001. Un an après, l’actualité nous apprend que le recyclage des déchets en particulier dans l’automobile, commence à devenir un véritable problème et que des mesures draconiennes seront prises dans les années à venir. 

Une des conclusions de ce rapport était : « Le marché de la fonderie se monte à 40 000 tonnes en Europe ; il était de 10 à 12 000 tonnes il y a 8-10 ans. Cela signifie que, d’ores et déjà, le gisement potentiel de pièces en fin de vie se monte à environ 10 000 tonnes, il est vrai disséminées. Que leur collecte ne soit pas actuellement organisée ne rend pas pour autant contestable leur existence. Ce marché va s’accroître au fil des ans, au rythme de la production des années précédentes (le gisement sera donc de 40 000 tonnes dans 10 ans etc..). C’est précisément le caractère’ recyclable du magnésium qui explique l’explosion de la demande dans le secteur automobile. Cette activité va donc s’organiser, des acteurs vont apparaître, un marché se dessiner, la collecte se mettre en place.

De ce point de vue, de par sa situation géographique et ses compétences dans le Magnésium, le site de Marignac dispose des atouts nécessaires et uniques lui permettant progressivement de rééquilibrer son activité entre la production de métal primaire et le retraitement/valorisation du Mg de récupération. Une telle ré-orientation de l’activité constitue une opportunité à saisir pour étayer la pérennité de l’établissement et de ses emplois directs et induits (plus de 600 en tout) dans la vallée et pour en faire le « Pôle Grand Sud-Ouest européen (incluant la péninsule ibérique, voire l’Italie) du recyclage du Magnésium (y compris, pourquoi pas une filière de fabrication de pièces ? ). »

Ce projet est, on le voit, encore plus d’actualité aujourd’hui et le deviendra de plus en plus.

 

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Emile Montfort et Maleine Clary tous deux retraités

du canton de Saint-Béat’

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

L’opinion des syndicats et du Collectif pour l’Emploi dans le Haut-Comminges

 

Après les citoyens du canton de Saint-Béat c’est au tour du syndicat CGT et du Collectif pour l’emploi en Comminges de s’exprimer sur les possibilités qu’offre le site de PEM Marignac dans le Haut-Comminges.

« La lutte continue à Péchiney Marignac dit un délégué. Plus de 18 mois de lutte et les salariés de Marignac continuent à refuser leurs inscriptions à l’ANPE. Le syndicat CGT en appelle à tous les établissements du groupe Péchiney afin que nul ne «  reste sur le carreau » car il est inconcevable que des salariés qui ont durant de longues années donnés au travers de leurs personnes tout ce qu’ils pouvaient donner et qui de ce fait, ont enrichi le groupe, se retrouvent privés de leur emploi. Tout un chacun connaît les problèmes de Péchiney en besoin de main d’œuvre dans tous ses établissements. La Confédération, la Fédération de la Chimie CGT ainsi que les syndicats des usines sont déjà maintes et maintes fois intervenus sur ce sujet auprès de la Direction Générale. Et les mesures envisagées par elle sont plus qu’insuffisantes.

A ce jour, à Marignac, plus de 50 salariés sont encore en instance de finir leur carrière à l’ANPE . »

On reparle sans arrêt du rapport CIDECOS qui offrait la possibilité de transformer le site de fabrication de magnésium de Marignac en un site de retraitement de déchets d’alliages afin de récupérer le fameux métal. Toutes les installations le permettent, les ouvriers ont un savoir-faire unique puisqu’à ce jour, seule cette usine commingeoise travaille avec le brevet mis au point dans les années 60 et qui a considérablement enrichi le groupe et les actionnaires. En effet, il a été vendu fort cher à plusieurs pays dont les USA, la Norvège et le Japon mais ces sites ont fermés. Au niveau mondial, il ne reste donc que l’usine commingeoise à l’avoir utilisé avec succès pour la fabrication du magnésium. Elle pourrait aussi l’utiliser pour recycler les déchets industriels qui commencent à poser problème et qui vont en poser de plus en plus surtout dans le domaine de l’automobile. Au rythme où l’on va, en 2050, il y aura 2 milliards de véhicules sur toute la planète (1) ce qui veut dire que la production va considérablement augmenter durant les prochaines années et comme il faudra prévoir à limiter voire à supprimer la pollution, il est plus que probable que les véhicules de l’avenir seront fabriqué différemment. Le marché du recyclage sera considérable. Les constructeurs d’automobiles cherchent déjà des porteurs de projets pour traiter ce problème. Marignac est là et peut commencer son travail du jour au lendemain, il suffit que les multinationales et les pouvoirs publics s’entendent sur le sujet.

« Il faut aussi rappeler qu’une étude de faisabilité, continue le délégué, a été faite et elle dit bien que 150 emplois seraient conservés sur le site. Le Conseil Régional a voté à l’unanimité le souhait de voir réaliser ce projet avec une participation à l’étude, le Conseil Général a opté pour les mêmes mesures. Toutes les démarches pour aboutir à une Table Ronde avec le Collectif composé de partenaires sociaux, des pouvoirs publics, du bassin de l’emploi, des organisations politiques et des associations sont encore à ce jour au point mort. Malgré les rencontres avec la sous-préfète, il n’y a aucune réponse. Personne ne bouge. Pourquoi ?

La direction générale de Péchiney refuse absolument de recevoir les délégations tant syndicales qu’associatives. Les salariés plus que jamais, sont fermement déterminés à continuer leur lutte pour tous, tant employés dans l’unité de recyclage que reclassés ou bien à reclasser et pour le respect dû à ceux qui bénéficient des mesures d’âge. Péchiney avait promis un plan « social » exemplaire, il a concocté le plus mauvais que l’on ait connu de mémoire de syndicaliste, la cinquantaine d’exclus en est bien la preuve. Quant aux promesses fallacieuses, elles n’engagent que ceux qui veulent bien y croire ».

Le Collectif pour la défense de l’emploi en Comminges a déclaré à la Commission Economie du Conseil de Développement le mardi 22 octobre revenant toujours sur le projet CIDECOS :

« En septembre 2001, un cabinet d’expertise mandaté par le Comité Central d’Entreprise de Péchiney Electro Métallurgie concluait son rapport en soulignant que le recyclage des déchets industriels des déchets de magnésium provenant en particulier des voitures en fin de vie devrait permettre de créer à Marignac un pôle européen de recyclage de ces déchets, activité à laquelle pourrait s’ajouter un atelier de moulage de pièces automobiles en magnésium.

Cette analyse et ces propositions s’appuyaient sur des essais techniques réussis, bien que rapidement interrompus par la direction du groupe. Cette étude aurait dû être poursuivie pour s’assurer du bien fondé de ces résultats et pour rechercher des entreprises intéressées puisque nous le savons, Péchiney souhaite se défaire non seulement de Marignac mais de la plupart de ses sites Pyrénéens.

C’est en fonction de ces éléments que depuis de longs mois, nous demandons que se réunisse une Table Ronde regroupant sous l’autorité de Monsieur le Préfet et de Madame la Sous-Préfète, des élus, des représentants d’entrepreneurs, d’organisations syndicales, d’autres institutions, organisations et associations concernées par le développement économique du Comminges. Cette réunion pourrait être consacrée à une information approfondie sur le recyclage des déchets industriels de magnésium et à l’analyse des conclusions du cabinet d’expertise. Monsieur Laplagne, membre du Comité Central d’Entreprise de PEM et Monsieur Durand, président du Comité d’Etablissement de PEM Marignac sont prêts à y participer. A l’issue de cette réunion, le lancement d’une étude de faisabilité pour la création d’un pôle européen de recyclage des déchets industriels de magnésium à Marignac pourrait être décidée par les autorités responsables. Le Conseil Régional de Midi-Pyrénées pourrait mener à bien cette étude avec l’appui du Ministère de l’Industrie et le soutien actif de tous les élus du Comminges : député, sénateur, députés européens, conseillers régionaux, conseillers généraux, présidents des Communautés de Communes, maires et conseillers municipaux…

Nous demandons à cette assemblée qui réunit des femmes et des hommes soucieux de l’avenir du Comminges, de mandater le Président et le bureau du Conseil de Développement, pour demander à Monsieur le Préfet de Région préfet de la Haute-Garonne et à Madame la Sous-Préfète d’organiser cette réunion dans le mois suivant. »

L’ultimatum est lancé : ou la date de tenue de cette réunion est fixée ou bien il y aura des manifestations surprises après le 22 novembre 2002. Mais d’où viendra la décision de tenir cette Table Ronde tant demandée ? La population est dubitative et a l’impression que cette région est totalement abandonnée par les plus hautes instances qui ne s’occupent absolument pas de ce qui s’y passe. Donneront-elles au Préfet le feu vert pour aider à garder l’emploi sur le Comminges ou bien est-il décidé que ces vallées dont ni la culture ni le patrimoine ne sont mis en valeur et où le tourisme n’a jamais fait l’objet d’attentions particulières, doivent mourir ? C’est l’opinion générale qui prédomine. Certains avancent même avec pessimisme : « deviendrons-nous un réservoir de Maisons de Retraite ? ».

A l’intérieur de l’usine, le conflit est toujours présent mais a changé de forme. Dans les 18 embauchés, certains ouvriers refusent absolument de travailler paralysant ainsi le redémarrage des fours, ce qui bloque la situation au niveau d’un éventuel recyclage du site. Des dissensions graves apparaissent désormais et le fossé se creuse entre ceux qui veulent travailler (l’immense majorité) et ceux qui ont une attitude négative.

La Table ronde serait dans tous les cas, on le voit bien, la bienvenue, elle permettrait de redonner espoir et de ramener une sérénité qui paraît être perdue.

 

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L’usine vue de la plaine de Marignac

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Le rapport qui prouve que le site de Marignac est viable

 

Le 4 septembre 2001, Raphaël Thaller, expert auprès de la société CIDECOS, qui avait suivi les essais de retraitement des déchets de magnésium effectués à la demande du Comité Central d’Entreprise et avec la bénédiction de la direction de Péchiney, présentait aux ouvriers, aux élus, au Comité d’Action et à la population, une esquisse de son rapport qui demeurait, bien évidemment confidentiel car il devait être présenté complet à la réunion du CCE du 13 septembre à Paris. Le groupe Péchiney avait laissé faire car il pensait, sans nul doute, que ces essais ne réussiraient pas et qu’il gagnerait la bataille plus vite, les ouvriers calmés par les promesses et la population éloignée, ne réagiraient plus. Mais ces essais arrangeaient aussi les responsables économiques de la région car, d’après eux, les manifestants qui défendaient non seulement leur travail mais aussi par extension celui des autres, s’ils continuaient leurs actions, feraient fuir les touristes.

Pourtant cette région ne les attire pas vraiment mais ce n’est pas la faute de l’usine, c’est tout simplement parce que, petit à petit, la population a vieilli, - toute une tranche d’âge étant partie travailler ailleurs-  et n’a plus rien fait pour moderniser les vallées. Les porteurs de projets se sont retrouvés isolés de même que les associations qui « voulaient faire quelque chose » et qui réussissaient. Ces dernières, d’ailleurs, se sont vues laminées par une petite partie de la population pour qui ne doit exister que les activités traditionnelles. Tout ce qui est nouveau et qui apporterait une véritable renaissance de ces vallées est rejeté avec force.

Malgré toutes ces réactions négatives, peu à peu, certains émergent mais il faut être né ici ou bien être soutenu par les élus. Le plus bel exemple et peut-être l’unique dans toute cette partie du Comminges, Barousse comprise, est celui de l’Association Patrimoine et Culture Comminges et Val d’Aran à Saint-Béat qui, depuis six ans, œuvre pour la défense et la restauration du patrimoine dans la ville. Un emploi a été crée et ce n’est que cette année, que les efforts ont été récompensés.

Luchon a aussi vieilli, le thermalisme est en crise et pourtant l’établissement est ultra moderne, entièrement rénové. Mais il ne faut pas oublier que dans cette ville, les hôtels datent du 19ème siècle et qu’aucun propriétaire n’a les moyens de mettre aux normes actuelles de tels bâtiments. Ils sont transformés en appartements luxueux par des promoteurs immobiliers ce qui n’apporte guère, en termes d’emploi à la cité thermale où travaillent toutefois 6000 personnes saisonniers et temps plein.

L’établissement thermal de Barbazan est resté fermé cette année 2002 à cause d’une bactérie plus tolérée en 2001. Les propriétaires n’ont pas non plus les moyens de le transformer selon les normes européennes exigées. Bien sûr, un casino a été ouvert sur la commune ce qui a généré 25 emplois et les résultats sont concluants mais cela n’est pas suffisant pour maintenir les actifs au pays.

Tout cela fait que le rapport CIDECOS est très important car ce qu’il propose est vital pour le pays.

En effet, selon l’expert, «  il existe des pistes qui permettraient de donner le temps au site de Marignac, à savoir : en apportant des réductions de coût et/ou en engageant une diversification de ses activités par la valorisation de ses compétences et de son outil notamment dans le recyclage des déchets de magnésium, rebuts propres de fonderie mais aussi pièces en fin de vie. »

En fin juin 2001, un groupe de pilotage composé de 5 membres du CCE, de 2 représentants de Marignac spécialistes de l’activité magnésium et de représentants de la direction à été mis en place pour procéder aux essais dont la plupart ont été réussis. Plusieurs hypothèses ont été étudiées mais il restait pas mal à faire sur certaines lorsque la direction a décidé le 31 août 2001 de mettre fin aux activités de ce groupe de travail.

L’expert précise les pistes explorées :

  «   - des projets de recyclage de déchets d’alliage de Mg dans le creuset de réduction et/ou dans le four Magnétherm (séparation des métaux).

-         le recyclage de déchets Mg de différentes catégories ou classes

-         - la comparaison entre les avantages/inconvénients du fonctionnement en Silicothermie ou en Aluminothermie, voire du passage de l’un à l’autre (flexibilité)

-         la distillation de crasses de Mg (sublimation)

-         l’utilisation de FesiAl (fabriqué au four Fesi) afin de réduire la facture de l’aluminium par le recours à des déchets d’aluminium moins coûteux que le fil coupé

-         l’amélioration de la calcination de la dolomie

-         le traitement de l’alliage sur la roue R4

-         la valorisation du laitier Mg

-         la valorisation des fines de dolomie pour l’amendement des sols agricoles.. »

Comme on le voit, beaucoup de domaines ont fait l’objet de recherches dont peut-être les plus importants : le recyclage de déchets pour la récupération du magnésium et sa ré-utilisation dans l’automobile en particulier, le passage des crasses de magnésium (scories produites par le métal en fusion) de l’état solide à l’état gazeux (qui peut être récupéré), le laitier qui n’est rien d’autre qu’un sous-produit provenant de la fusion du métal et qui est uniquement formé de silicates, ces derniers étant utilisés dans les industries du bâtiment, de la verrerie entre autres, peut être traité soit par sa vente soit sur le site en l’aménageant et enfin , très important pour les sols malmenés par l’agriculture intensive, la transformation des fines de dolomie (ce sont de minuscules morceaux de minerai séparés par criblage après la fusion de la roche sédimentaire constituée uniquement de dolomite qui est un carbonate naturel composé de magnésium et de calcium) en engrais naturel.

Le rapport s’appuie surtout sur le recyclage des déchets qui est pour tous d’un intérêt plus qu’évident « d’autant, est-il écrit, que comme pour tout produit, la réglementation impose d’intégrer cette problématique dès la conception des produits  du berceau jusqu’au tombeau ».

Les déchets sont, on s’en doute, de différentes sortes rangées par les spécialistes en « classes » qui ne peuvent pas recevoir le même traitement tant au niveau de la collecte qu’à celui de leur recyclage. La collecte n’est absolument pas organisée pour le moment alors que les problèmes de véhicules en fin de vie apparaissent et vont devenir cruciaux. Et il est évident qu’il existe plusieurs procédés de recyclage. Celui qui conviendrait à Marignac consiste à traiter les déchets de classe 1 dits « propres » à savoir « des pièces hors norme et autres rebuts générés en grande quantité (40 à 50% de taux de rebuts en moyenne) par les fonderies sous pression. On estime à 34Kt de Magnésium ainsi recyclés dans le monde ».

Ce domaine-là est déjà exploré en Europe par les sociétés MEL (en Grande-Bretagne et en Tchequie), METALLIC ALLOYS en Italie, REMAG et ECKART en Autriche. Il est évident que ces entreprises ont déjà leurs réseaux propres mais ne sont pas dangereux à proprement parler au niveau de la concurrence car l’expert affirme que : « Considérant que les coûts logistiques entre les fonderies et l’unité de recyclage sont importants (environ 30% du coût total qui s’élève en moyenne à 6000 F/tonne) et qu’ aucun recycleur n’est installé dans la moitié sud de la France ni en Espagne, la création d’une telle unité permettrait aux clients installés dans cette zone d’économiser 1000 F/tonne par rapport au coût de retraitement actuels chez MEL en Grande-Bretagne. »

Les avantages au niveau du chiffre d’affaires seraient considérables : en deux ans, ils doubleraient.

L’expert présente également les autres projets de recyclage de déchets de différentes classes, au creuset (en réduction) et/ou au four magnétherm. L’intérêt de ces pistes à suivre est aussi plus qu’évident car on peut produire le Mg ou des alliages tout en recyclant les déchets et ceci en même temps. De ce fait, l’énergie produite par la vapeur de Mg lors de son passage dans le creuset permet de fondre les déchets. L’expert précise que l’on peut ainsi « accéder à une source de Mg contenue dans les déchets meilleur marché que celle habituelle de la dolomie calcinée et obtenir à l’issue de cette opération du métal primaire : 3 Kt de déchets incorporés entraîne 5 à 6 Kt de vapeur Mg, soit au final l’obtention de 8 à 9 Kt de Mg allié ». Ce qui procurerait des gains très importants.

Le marché du recyclage est donc ouvert sans concurrencer personne, il suffirait de s’associer en partenariat avec les constructeurs automobiles nationaux, leurs sous-traitants, les industriels qui fabriquent le moulage des pièces automobiles. Tout ce beau monde pourrait venir s’installer sur le site de Marignac sans attenter à l’environnement. Actuellement les déchets utilisés par PEM qui les rachète à l’Italien Raffmétal pour les utiliser sur son site de Chateaufeuillet (seulement 100 tonnes par an) « ne sont pas récupérés par les procédés de séparation de métaux utilisés par les industriels, mais par tri manuel chez les casseurs/démonteurs d’automobiles dont le principal métier est de récupérer les pièces aptes à effectuer une seconde vie (pièces d’occasion) et d’éliminer les autres (notamment auprès des récupérateurs/recycleurs). Il faut noter que dans certains pays cette activité de démontage des véhicules en fin de vie bénéficie de subventions ». Le procédé utilisé à Marignac est unique et peut être utilisé immédiatement.

On peut se demander raisonnablement pourquoi PEM a catégoriquement refusé ce projet qui aurait généré de substantiels bénéfices au groupe mais aussi pourquoi, à ce jour, il n’ a pas trouvé de repreneur car il est évident que celui qui s’installerait à Marignac profiterait d’un site unique, au carrefour de voies de communication importantes (Espagne, Portugal et de là l’Afrique) mais aussi toute la France, avec des fours prêts à redémarrer et conçus pour, avec des ouvriers qui ont un savoir-faire indéniable. Car comme le conclut l’expert : « en la matière, la demande génère l’offre ». Si PEM ou une toute autre société s’adressait à ces entrepreneurs de récupération, ils accepteraient rapidement, écrit-il, car ils y verraient un intérêt immédiat. Un marché s’installerait. Raphaël Thaller le précise bien : « ce réservoir (la collecte de pièces en alliage de Mg NDLR) est important et tend à se développer rapidement, ce segment étant en passe de devenir le premier, avec notamment un taux de croissance annuel moyen de 13%).

Le Collectif pour l’Emploi dans le Haut-Comminges l’affirme : « PEM veut se débarrasser de ses sites pyrénéens ». Alors, pourquoi ne cède – t-il pas le site de Marignac, qu’il n’a pas fermé, à un repreneur ? Le Conseil Régional a proposé de financer les études sur un projet de recyclage mais la tenue de la Table Ronde ne se fait pas. Rien n’avance à ce jour. Par contre, les problèmes de pollution du site ont été dévoilés par la municipalité de Marignac qui a demandé à Péchiney Electro Métallurgie (PEM) de les faire disparaître. La multinationale fait la sourde oreille comptant sans doute sur le temps pour que les habitants, les élus et les associations oublient. Elle espère fermer l’usine à plus ou moins long terme, en toute tranquillité sans débourser un centime pour la dépollution, (qui serait à la charge d’un repreneur éventuel, ce que personne ne veut) et ainsi de transformer ce site en une friche industrielle insalubre.

 

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Zone de Texte:

 

La colline du laitier derrière l’usine.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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